Love. Hate. Action. Violence. Death. In one word... Emotion.
"Les lectures c'est extraordinaire. Finalement, je crois que ce qu'il y a de plus extraordinaire à filmer, ce sont les gens qui lisent. Pourquoi aucun cinéaste ne le fait-il ? Filmer quelqu'un en train de lire, ce serait déjà beaucoup plus intéressant que la majorité des films qui se font. Pourquoi le cinéma ne serait-ce pas simplement filmer des gens en train de lire de beaux livres ?".
Jean-Luc GODARD, 1967.
Des lignes qui m'accompagnent depuis quelques semaines, fragment de pensée godardienne qui résume si bien ce qui me séduit dans l'univers du cinéaste, vaste sphère en mouvement que je suis loin d'avoir explorée : c'est à peine si j'en ai franchi le seuil. Et je m'en réjouis, tout comme je me réjouis de n'avoir pas encore vu Benjamin Biolay sur scène, de n'avoir pas lu toutes les oeuvres de Joyce Carol Oates (dont je ne connais même pas tous les titres), de n'avoir pas encore serré la main de David Lynch. Les films de Godard auront été ma plus belle découverte de l'année, la plus sentimentale et la plus enrichissante ; quel supplice serait d'en apercevoir déjà la fin alors que chaque rencontre avec ses personnages est une nouvelle réjouissance.
J'ai choisi cette vidéo, une de celles publiées par Blow Up le site cinéma d'Arte, hommage tendre, drôle et intelligent à Pierrot le fou, film tendre, drôle et intelligent, mais pas seulement.
L'art, la littérature, la poésie sont au coeur de cette oeuvre qui se nourrit d'autres, leur rend hommage, les sublime tout en y puisant force et émotion.
Pierrot le fou, le plus romantique des poèmes en images composé sous les auspices d'Arthur Rimbaud à qui Godard emprunte quelques vers. Une citation finale, un travelling latéral, la lumière diffuse du soleil qui réchauffera le coeur des amants pour l'éternité. Un poème en couleurs auquel il est difficile de ne pas associer le sonnet Voyelles. Ces couleurs primaires, essentielles, chères à Godard, repères pour son spectateur qui retrouve, dès le générique, ses marques, un monde familier où il sait qu'il se sentira bien.
Un film tableau. Nicolas de Staël, Marianne Renoir. Vélasquez. Et Ferdinand qui lit dans son bain mais sans chapeau, c'est qu'il n'a pas dû voir Some Came Running.
La musique aussi, les chansons de Serge Rezvani, Fraise-Vanille, que l'on peut fredonner toute la journée.
Les mots, lus et écrits par Ferdinand, une clope glissée derrière l'oreille et un crayon noir coincé entre deux doigts, ou est-ce l'inverse ? Pierrot, mon plus beau héros romantique et chevaleresque.
Une autre vidéo publiée par la même équipe illustre bien mieux que je ne pourrais jamais le faire la richesse des films de Godard, odes à la littérature, qui répondent à ses propres souhaits. C'est une vidéo dont je ne me lasse pas, qui dit et montre ce qu'il faut voir et savoir ; elle se trouve ici, sur un site jaune soleil, bleu vacances, rouge passion. Pourquoi aucun cinéaste ne le fait-il, filmer des gens en train de lire ? Parce qu'aucun cinéaste ne pourrait le faire comme vous, Monsieur Godard.